Fonds d’archives Banque Populaire

Fonds d’archives Banque Populaire

Les publicités : une mine d’information !

Je vous avais parlé de Nadia, qui travaille au service marketing de la banque dont j’explore en ce moment les archives. Encore une belle rencontre !

Après lui avoir fait part de mon intérêt pour l’histoire des droits des femmes, elle m’a confirmé que les archives des banques pouvaient être vraiment pertinentes, notamment si l’on regarde du côté des anciennes campagnes de communication : « Parmi toutes les archives historiques que l’on conserve, les publicités sont de vraies mines d’information ! Elles suivent l’actualité et les modes, on sent l’air du temps quand on les regarde, on y retrouve toujours un petit quelque chose de familier… un peu comme une vieille photo de famille ! Les campagnes publicitaires permettent de se replonger dans une ambiance et un état d’esprit qui ne sont évidemment plus les mêmes aujourd’hui. Elles sont comme une photographie de la société à l’instant T. ». Et pour illustrer son propos, Nadia a ouvert un livre sur la publicité et m’a présenté comme exemples quelques affiches des Banques Populaires.

La publicité, miroir de la société ?

J’avoue avoir été un peu sceptique au début. Je n’en peux plus de la pub, elle est partout ! Bien sûr il y a des choses géniales, créatives, drôles et pleines de références populaires, mais je vois aussi beaucoup d’images standardisées dans lesquelles je ne me retrouve pas forcément.

Pour bien comprendre dans quelle société évoluent les femmes, Nadia me suggère bien au contraire de m’y intéresser : Comment les femmes sont-elles représentées ? Comment s’adresse-t-on à elles ?

Pour que je saisisse à quel point les représentations utilisées dans la publicité sont des indicateurs de la place des femmes, Nadia a pris le temps de me donner quelques éléments de contexte. Et vous allez voir, tout est étroitement lié ! En résumé, après la Seconde Guerre mondiale, les Trente Glorieuses permettent d’augmenter considérablement le pouvoir d’achat des classes moyennes et engendrent ainsi la société de consommation. Dès la fin des années 1960, les entreprises – dont les banques bien sûr – commencent à moderniser leurs stratégies de développement commercial pour toucher une clientèle toujours plus large, diversifiée… et de plus en plus féminine.

Annonce presse pour Intercarte, vers 1968. Fonds d’archives Banque Populaire.

Annonce presse pour Intercarte, vers 1968. Fonds d’archives Banque Populaire.

Et pour cause ! Si à cette période, comme le chantait alors James Brown, le monde est encore clairement un monde d’hommes, les femmes font résonner leurs voix pour l’émancipation : en 1965, elles peuvent ENFIN exercer une profession et ouvrir un compte bancaire sans l’autorisation de leur mari.

Affiche de grève ''Les libertés ne se donnent pas, elles se prennent''

Affiche de grève  »Les libertés ne se donnent pas, elles se prennent »

Puis les mouvements de mai 68 ouvrent la voie à de réelles avancées sociales qui se concrétiseront au cours des décennies suivantes en termes d’égalité homme-femme sur les questions salariales, de parentalité, de sexualité.

Les publicitaires doivent dès lors réinventer les codes de leurs campagnes de promotion pour séduire ces nouvelles consommatrices ! En cherchant de nouvelles sources documentaires, j’ai découvert énormément d’informations dans un ouvrage d’Hubert Bonin, spécialiste de l’histoire bancaire. Il parle d’une vraie « révolution de la communication commerciale » dans les années 1970-1980 car le marketing naissant et le succès des médias de masse conduisent en effet les entreprises à mieux cibler leurs messages. Etudes de marché et de comportement fleurissent à cette époque pour construire un discours adapté à une  nouvelle cible : la femme active.

 

Femmes, les banques vous aiment !

Nadia m’a montré une série de publicités de la Banque Populaire des années 1970 et 1980. Je me suis régalée à les décrypter avec elle, vous allez voir !
Alors, publicités des années 1970, qu’avez-vous à nous dire sur les femmes de votre époque ?

Campagne publicitaire de 1978 qui a contribué à populariser la marque et le logo de la Banque Populaire. Conception : Service Agence PPRP. Fonds d’archives Banque Populaire

Campagne publicitaire de 1978 qui a contribué à populariser la marque et le logo de la Banque Populaire. Conception : Service Agence PPRP. Fonds d’archives Banque Populaire

Campagne publicitaire de 1978 qui a contribué à populariser la marque et le logo de la Banque Populaire. Conception : Service Agence PPRP. Fonds d’archives Banque Populaire

Campagne publicitaire de 1978 qui a contribué à populariser la marque et le logo de la Banque Populaire. Conception : Service Agence PPRP. Fonds d’archives Banque Populaire

Campagne publicitaire de 1978 qui a contribué à populariser la marque et le logo de la Banque Populaire. Conception : Service Agence PPRP. Fonds d’archives Banque Populaire

Campagne publicitaire de 1978 qui a contribué à populariser la marque et le logo de la Banque Populaire. Conception : Service Agence PPRP. Fonds d’archives Banque Populaire

Les voilà au premier plan ! Et non plus à l’ombre d’un mari protecteur. Face à nous, le regard franc, elles montrent un visage fier et décidé. Institutrice, dactylographe ou professeure de sport, ces femmes semblent nous dire « j’ai choisi ». J’ai choisi de mener la vie que je veux, d’exercer le métier qui me plaît, de gérer mon argent à ma manière…

On remarque que les valeurs de la solidarité et du sociétariat sont au cœur du message. Et ce message est fort, car il associe l’image de la femme active professionnellement à l’idée d’un impact positif sur la société. Mais oui, les femmes aussi peuvent changer le monde !

Si les métiers représentés sont encore très « féminins » (secteur de l’enfance, du secrétariat, etc.), l’esprit militant hérité de mai 68 est clairement repris ici par la Banque Populaire qui s’adresse de manière individuelle à des femmes plutôt jeunes, indépendantes, engagées. Et grande nouveauté : on les fait même parler !

« Moi, je suis dactylo. C’est mon premier emploi. Quand on travaille, on a forcément besoin d’une banque. »

Ce principe de réalité est suivi d’arguments à visée commerciale qui font plutôt appel aux bons sentiments qu’à la raison… la femme indépendante des années 70 serait-elle encore perçue comme un peu candide ?

« J’ai choisi la Banque Populaire parce qu’il y a une bonne ambiance, des gens compréhensifs, solidaires de leurs clients. Je crois que c’est une banque coopérative. C’est peut-être pour ça qu’ils sont différents des autres. »

L’Histoire avançant parfois à grand pas, vous allez voir comment la représentation des femmes et de leur relation à l’argent va évoluer dans les années 1980…

De la femme indépendante à la femme puissante

La Banque Populaire, dans une nouvelle campagne publicitaire datant de 1984, reprend l’idée de la réalisation de soi en mettant en scène la femme active dans des métiers plus qualifiés, et socialement valorisés. En moins de 10 ans, elles en ont fait du chemin !

Campagne publicitaire « Une nouvelle énergie en France » qui rappelle en 1984 que l’énergie de la Banque Populaire se communique à ses client(e)s. Conception : Agence Young & Rubicam. Fonds d’archives Banque Populaire

Campagne publicitaire « Une nouvelle énergie en France » qui rappelle en 1984 que l’énergie de la Banque Populaire se communique à ses client(e)s.
Conception : Agence Young & Rubicam. Fonds d’archives Banque Populaire

Campagne publicitaire « Une nouvelle énergie en France » qui rappelle en 1984 que l’énergie de la Banque Populaire se communique à ses client(e)s. Conception : Agence Young & Rubicam. Fonds d’archives Banque Populaire

Campagne publicitaire « Une nouvelle énergie en France » qui rappelle en 1984 que l’énergie de la Banque Populaire se communique à ses client(e)s.
Conception : Agence Young & Rubicam. Fonds d’archives Banque Populaire

Campagne publicitaire « Une nouvelle énergie en France » qui rappelle en 1984 que l’énergie de la Banque Populaire se communique à ses client(e)s. Conception : Agence Young & Rubicam. Fonds d’archives Banque Populaire

Campagne publicitaire « Une nouvelle énergie en France » qui rappelle en 1984 que l’énergie de la Banque Populaire se communique à ses client(e)s.
Conception : Agence Young & Rubicam. Fonds d’archives Banque Populaire

Femmes d’affaires, médecins ou esthéticiennes, les femmes retroussent leurs manches et insufflent « une énergie nouvelle en France ». Ce nouveau slogan publicitaire reflète et légitime les nouvelles ambitions des femmes qui ont désormais acquis l’égalité professionnelle avec les hommes, grâce à la loi Roudy de 1983.

We can do it !

Quand la pub inspire la pub : Tout cela ne vous rappelle pas cette célèbre affiche de propagande américaine ?

Et voilà, encore une fois ma mère avait raison quand elle me rappelait que tout n’était pas rose dans les débuts de sa carrière professionnelle et qu’elle avait dû batailler contre de nombreux préjugés envers les femmes ! Malheureusement, des mentalités bien ancrées résistent parfois aux évolutions sociales. Pour preuve, il a fallu plus récemment compléter la législation en vigueur par la loi du 4 août 2014 pour imposer une égalité RÉELLE (!) entre les femmes et les hommes. Et du chemin reste à parcourir


Bon… sinon, ce look des années 80, on en parle ? On peut bien en rire, mais épaulettes et talons hauts n’étaient pas qu’une coquetterie, c’était une vraie tenue de combat !

 

 

Je crois que la publicité tente de refléter la femme idéale à chaque époque, celle à qui toutes les femmes voudraient ressembler. Une femme forte et libre, moi ça me plait !

Pour en savoir plus :

Banques et publicité

  • Banque et identité commerciale, la Société générale 1864-2014, Hubert Bonin, Ed. Presses Universitaires du Septentrion, 2014.

Les femmes dans la publicité :

Mai 68 et les femmes

(In)égalité femmes-hommes

Et cette « pépite » pour la fin…