Un dernier hommage à Françoise Héritier, une de nos plus grandes intellectuelles qui a su également toucher le cœur du public, s’imposait. Elle nous a quittés mercredi, le jour de ses 84 ans.
D’elle, je me souviens d’abord de son ouvrage, « L’Exercice de la parenté« , qui trônait en bonne place sur l’étagère de ma mère, professeur de sciences sociales au lycée.
Puis, j’ai lu et écouté à mon tour la féministe engagée. Je me souviens avoir été fascinée lorsque je l’ai entendu parler de son thème de prédilection : la place des femmes dans la société et les stéréotypes de genre. Car durant sa carrière, elle n’a cessé de déconstruire les idées reçues sur la différence entre femmes et hommes. Elle estimait nomment que les différences physiques pourraient ne pas être une donnée biologique originelle, mais « une différence construite« .
Un héritage unique, pionnier et résolument féministe.
Une sacrée femme, un sacré parcours. Connue pour ses engagements féministes, elle s’attelait à travers ses travaux d’anthropologie à démontrer l’absurdité des dogmes de la domination masculine. Elle était directrice d’étude à l’EHESS et avait succédé à Claude Lévi-Strauss au Collège de France.
La pierre angulaire de sa pensée, c’était l’égalité des sexes. « Il n’y a aucune raison objective, biologique, naturelle qui impliquerait une infériorité féminine et une supériorité masculine. Les deux sexes sont différents, mais la nature ne dit rien en termes de hiérarchie« , déclarait-elle. Pour Françoise Héritier, l’un des fondements de cette domination résidait en premier lieu dans le contrôle du corps de la femme par les hommes. « Le privilège exorbitant d’enfanter » représentait selon elle l’essence même de cette inégalité (La plus belle histoire des femmes, Seuil, 2011). Aussi était-elle convaincue que la généralisation de la contraception féminine constituait une « révolution essentielle » (Masculin/Féminin, Odile Jacob, 1996). « Pour la première fois de l’histoire de l’humanité, les femmes peuvent choisir si elles veulent ou non procréer, quand, combien de fois, avec qui. Elles redeviennent sujets à part entière » affirmait-elle.
Le 8 novembre dernier, l’ethnologue s’était vu décerner le prix spécial du jury Femina pour son ouvrage Au Gré des jours (Odile Jacob, 2017). « C’est cette capacité d’alterner aisément austérité et prospérité, maladie et santé, rage de vivre, peur de mourir, qui me donne force et résistance« , écrivait-elle alors. Une rage de vivre dont elle a témoigné tout au long de son combat pour le droit des femmes.
Il y aura tant à dire. Mais si, pour conclure, nous l’écoutions plutôt. Il y a 8 ans, elle parlait ainsi de la parité dans les entreprises… autant dire une véritable inspiration pour mon projet !
Dans son ultime livre, Au gré des jours, Françoise Héritier conclut ainsi : «Fermez doucement la porte derrière vous.»
Pour en savoir plus :
Françoise Héritier, au nom de la femme
Françoise Héritier, corps et âme
Ses travaux universitaires